Mises en orbite dans le ciel blanc immaculé de la galerie Almine Rech de Bruxelles, les sculptures murales de Thomas Kiesewetter nous entraînent dans une autre dimension de son univers. Sa nouvelle constellation regroupe un ensemble de sculptures présentées sur les voûtes verticales de la galerie. Si les sculptures de Thomas Kiesewetter suggèrent une désorientation optique, c’est parce qu’elles transforment la surface murale en leur propre surface plane. L’exposition ‘Midnight Sky’ éclaire huit astres sculptés, Mars, Pluto, Earth, Jupiter, Venus, Neptune, Mercury, Saturn et Uranus. Du point de vue de l’artiste, ses nouvelles structures métalliques questionnent la nature et le sens même de la tradition sculpturale, depuis qu’elles ne se trouvent plus dans le même espace que le visiteur : « Vous pouvez les regarder mais elles semblent ailleurs, comme des planètes dans le ciel ».
Ce natif de Kassel puise son inspiration dans le registre des modernistes et des constructivistes, ainsi que dans la sculpture d’après guerre qui prit une nouvelle tournure dans le sillage de l’art minimal et américain. Le sculpteur qui jusqu’à lors proposait une vision à 360° de ses créations, quitte la sphère tridimensionnelle pour s’étendre le long des cimaises verticales de la galerie. Comme des dessins suspendus, ces agrégats de métal, géométriques, anthropomorphiques et colorés gravitent dans le cube blanc. Paradoxalement, pendant que la « peinture » s’émancipe du mur, la sculpture aspire à devenir un travail visuel. « L’un voit les sculptures murales comme une peinture, l’autre ne peut leur tourner autour, et le dernier peut seulement leur faire face » observe l’artiste.
Thomas Kiesewetter délaisse ici le silence du monochrome pour une interaction de formes et de couleurs dont la palette chromatique n’est pas sans rappeler les démarches de maîtres modernes. Les surfaces sont nonchalamment peintes ou vaporisées de couleurs suivant la forme de la sculpture. Sa manière de sculpter hésite alors entre la précision trouvée dans la manipulation des formes d’une part et l’application de larges coups de pinceau d’autre part. Dans son atelier de métal de Berlin, le sculpteur repense son art en relation avec la peinture, ainsi il propose une parfaite perspective frontale de l’ « image sculpturale ».
Eva Kirilof & Marion Estimbre