Du 2 au 25 juin, Almine Rech exposera This Is Your Lucky Day, première exposition solo parisienne de l’artiste espagnol Javier Calleja (né à Màlaga en 1971). On a déjà pu apprécier son travail dans de nombreuses foires ou expositions personnelles et collectives chez Almine Rech partout dans le monde ; aujourd’hui, au cœur de la capitale française, dans l’espace Matignon de la galerie, cette nouvelle exposition présente un aspect inédit de la pratique de l’artiste de Màlaga.
Il présente ses œuvres dans ce quartier historique, à deux pas de la mythique avenue des Champs Élysées, à l’ombre du célèbre Arc de Triomphe. Calleja a composé un ensemble intime qui propose une respiration, loin de la vie trépidante de la ville mais reliée à son environnement urbain. L’installation, qui rassemble une série d’œuvres sur papier au rez-de-chaussée et de toiles au premier étage, cherche à recréer l’ambiance d’un environnement paisible, presque ordinaire mais très ludique, enrichi de clins d’œil discrets aux traditions culturelles françaises. Comme la plupart de ses expositions personnelles, cette sélection marque un certain nombre de nouveaux départs sans toutefois s’écarter du langage visuel et des concepts que l’on reconnait immédiatement comme les siens. Même s’il révèle des aspects inédits de sa pratique, de nouvelles approches de la composition ou palettes de couleurs, et une ambiance quelque peu rajeunie dans un monde post-COVID, le travail de l’artiste reste fermement ancré dans le cadre du « simple, mais pas facile ».
Référence espiègle au titre de l’exposition, This Is Your Lucky Day offrira pour la première fois au regard du public des croquis bruts de l’artiste, transposition de l’énergie créative de son paisible atelier des environs de Malaga dans ce quartier chic de Paris. Telles des boîtes de Pétri de l’œuvre de Calleja, ces feuilles de papier grouillent de griffonnages, de notes et d’éléments qu’il a parfois développés dans ses dessins, peintures, sculptures, collaborations ou autres projets. Tout y est : croquis approximatifs de ses célèbres personnages, expérimentations de la forme des visages, des coiffures ou des yeux, associations colorielles ou essais de composition, en passant par des listes de mots et de citations, marques gestuelles et données réelles aléatoires - numéros de téléphone, dates, lieux, etc. Ces reliquats de l’atelier reflètent le flot tumultueux de la conscience qui forme la base de l’iconographie de Calleja, restreinte mais porteuse d’espoir. Comme une espèce d’introduction à sa pratique, elles entrainent le spectateur vers le premier étage où une sélection de grandes toiles rétrécit visuellement l’espace.
Avec leurs cadres sur-mesure de style ancien, ces cinq nouvelles peintures colorées expriment une fois encore l’intérêt constant que Calleja porte au jeu des échelles et des proportions. Conçus pour modifier la perception du regardeur par illusion d’optique, ces écrins démesurés invitent à une expérience trompeusement lilliputienne. Le public n’est plus un simple observateur : ses repères dimensionnels deviennent vivants, mouvants, il est aspiré dans l’exposition et ainsi amené à se rapprocher de tous ces protagonistes aux grands yeux. Et pourtant, comme s’ils venaient de pénétrer l’espace depuis l’élégante avenue au dehors, ces personnages emblématiques semblent un peu plus débonnaires, adultes, avec leurs tenues plus soignées que d’ordinaire. Dans un discret hommage à Paris - capitale culturelle du monde - les cadres richement ouvragés font référence à ses traditions picturales patrimoniales. Les tenues sont un clin d’œil à son rôle dans la mode, tandis que la dynamique des nouvelles toiles s’oriente vers la tradition de la bande dessinée : les éléments textuels figurent désormais aux côtés des muses emblématiques de Calleja, et non plus simplement sur leurs t-shirts.
— Saša Bogojev, writer and curator