La galerie Almine Rech a le plaisir de présenter la troisième exposition personnelle de Jean-Baptiste Bernadet. Cette exposition présentera de nouvelles peintures de l’artiste.
Jean-Baptiste Bernadet l’a souvent martelé : « Je n’ai aucun rapport militant à la peinture. Elle est simplement la discipline la plus pratique pour moi, celle qui me convient le mieux, celle où je me sens bien, celle qui me permet de faire quelque chose et de voir tout de suite le résultat ». Il n’empêche : si Jean-Baptiste Bernadet tient à garder ses distances avec elle, il n’en demeure pas moins un vrai peintre. « Un peintre de paysage » comme il se définit lui-même. Il ajoute même : « Je suis un peintre impressionniste, au sens étymologique du terme ». Autrement dit et pris au pied de la lettre, Bernadet peint des impressions fugitives, subjectives, des nuances de lumières et de sentiments, il aime vivre le temps de la peinture en train de se faire, l’instantanéité de ce qui apparaît.
« Au pied de la lettre », l’expression lui va bien, lui qui est passionné par la littérature et par Proust avec lequel il se sent des affinités : la mémoire, le temps suspendu de la sensation, le principe de fragment, l’effet de kaléidoscope, la recherche de la réfraction. À ce propos Bernadet dit aussi avoir une analogie avec Strindberg et ses célestographies, ce procédé qui, croyait-il, en disposant ses plaques photographiques sur le rebord de sa fenêtre, la nuit, lui permettait de photographier les étoiles alors que c’était les grains de poussière qui créaient l’image.
Surface sensible, accident, hasard. Car Bernadet est également un peintre de l’incertitude. De la suspension. Et de l’aventure. « Souvent dans mes tableaux, les choses arrivent toutes seules. Lorsque je peins une touche ce n’est pas une touche qui se met en scène, une touche qui dit je sais ce que je suis en train de montrer, non c’est une touche plus incertaine, plus imprévue. Je ne sais jamais où je vais ». Comme un enchaînement permanent, comme des suites de notes, comme une improvisation qu’on pourrait rapprocher de celle d’un jazzman à partir de sa grille.
Il lui faut commencer le tableau, s’appuyer d’abord sur un fond, puis disposer ses noisettes de peintures, les étaler et continuer jusqu’à ce qu’il trouve le moment juste, le bon équilibre, le rythme, l’harmonie entre la lumière, la couleur. S’il va trop loin, il recommence, corrige, efface, revient en arrière, soustrait ou recouvre. Toute la difficulté pour lui et la magie pour nous spectateurs, est là, dans la justesse comme on le dit d’une suite de notes, de sons. Le tableau se génère dans sa capacité provisionnelle, il se joue entre l’apparition et la disparition, jusqu’à ce qu’il atteigne cet état de suspension, d’entre deux, de potentialité de façon à ce qu’il témoigne à la fois d’une assise, d’une trame structurée et en même temps qu’il reste le plus ouvert possible.
Et de même que Bernadet n’a pas d’automatisme, de certitude, de règle de jeu pour chaque toile, il n’en a pas non plus pour ses séries. Elles ne sont pas décidées à l’avance, elles se constituent d’elles-mêmes, au fur et à mesure et ne sont jamais vraiment closes. Encore faut-il même qu’elles existent, comme c’est le cas avec celles, Vétiver et les Fugues qu’il travaille depuis cinq ans, qu’il a présentées lors de précédentes expositions et qui révèlent, l’une des évanescences, des transparences, l’autre le rythme plus soutenu de touches et des traits de couleurs. Car il arrive aussi que Bernadet travaille hors séries, qu’il peigne des tableaux hors de tout cadre, des tableaux solitaires, à la croisée les uns des autres et que seule une exposition, comme c’est le cas de celle-ci, peut faire dialoguer. Ce qui lui importe avant tout, c’est chaque fois de tout remettre à plat, de rebattre les cartes pour attraper au vol de nouvelles sensations.
Jean-Baptiste Bernadet est né à Paris en 1978. Il vit et travaille à Bruxelles et New-York. Diplômé de l’ENSAV La Cambre à Bruxelles (2003), Bernadet a participé à plusieurs résidences d’artistes, à Triangle Studios, Brooklyn (2012), APT Studios, Brooklyn (2011), et Chianti Foundation, Marfa, Texas (2010). Son travail a été présenté dans plusieurs expositions personnelles en Europe et aux Etats-Unis, notamment à la Galerie Almine Rech à Londres et Bruxelles en 2016. Depuis 2001, Jean-Baptiste Bernadet a participé à plusieurs expositions de groupe dans des institutions comme le WIELS à Bruxelles en 2015, 2010 et 2009, et le Musée des Beaux-Arts de Tourcoing en 2006.
Henri-François Debailleux
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